Innopolis : L’innovation des villes et territoires

Les villes et territoires de demain seront-ils forcément connectés ?

Les 21 et 22 septembre dernier, les équipes de Makin’Ov ont fait le tour du salon Innopolis à Paris. Si vous nous suivez sur Instagram, vous avez même peut-être déjà aperçu nos stories ! Le salon Innopolis, c’est deux journées dédiées aux innovations des villes et territoires, avec au programme : conférences, pitchs de startups et stands des acteurs de la transformation des villes et territoires. On vous livre tout de suite nos impressions sur le salon et notre résumé synthétique des échanges riches que nous y avons eu.

Repenser nos territoires grâce à l’innovation, un défi clef en pleine crise environnementale

A l’aube d’une nouvelle ère marquée par l’urgence environnementale, nous devons accompagner les territoires dans une transition globale et trouver des solutions durables aux problèmes qui nous sont posés. Cette transition nécessite des moyens et des réflexions sur le long terme pour optimiser, avec les ressources à disposition, les services rendus aux populations.

Une asymétrie des moyens humains, financiers et des infrastructures à disposition dans les territoires

Les territoires ne sont pas tous égaux face aux crises, et ne disposent pas des mêmes moyens pour les dépasser. C’est le cas à l’échelle mondiale mais aussi de la France. En métropole, nous observons des inégalités entre capitale, grandes villes et territoires ruraux. Et quand nous parlons de moyens, nous ne parlons pas seulement de financements, mais également d’entreprises en ingénierie et en innovation. Les startups et les structures l’innovation ne sont pas bien réparties en province. On parle même de désert de l’innovation. Autre ressource mal répartie, et dont nous avons beaucoup entendu parler tout au long du salon, c’est la connexion et le numérique.

La fracture numérique, en France mais aussi dans beaucoup d’autres pays est vue par les experts des territoires comme un facteur très fort d’inégalité. En effet, une population pas ou peu connectée sera difficilement inclue dans la vie de la communauté. La multiplication des nouveaux dispositifs connectés et intelligents est également délicate dans les territoires mis à l’écart du réseau. Nous pouvons de plus supposer que la crise sanitaire, avec son lot de télétravailleurs exilés de la capitale a mis en évidence les écarts d’attractivité relatifs à l’accès à internet.

Face aux grands enjeux environnementaux de notre siècle nous devons trouver solutions durables

Dans ce paysage très contrasté, le défi central est d’accompagner les villes et territoires vers de nouveaux modèles, plus durables et soutenables que ceux actuellement à l’œuvre. Certains vont même plus loin, nous proposant de repenser complétement le modèle économique et les objectifs globaux des territoires en question. Pour cela, nous devrions intégrer dans nos modèles de nouveaux indicateurs, puisque le baromètre économique ne suffira plus demain à traduire la performance de nos organisations pour les citoyens. Nous pourrons alors mesurer des indicateurs sociaux, des jauges de bonheur, des seuils carbone…

Dans ce nouveau modèle qu’il nous reste à penser, le fonctionnement centralisé du territoire national et de tous nos flux (énergies, données, eau, déchets, etc..) sera très rapidement obsolète. La transition des territoires passera alors par une décentralisation systématique et donc un raccourcissement des chaînes logistiques.

La transition des territoires par l’innovation

Pour réussir cette transition des territoires, avec tous les enjeux et défis que cela comporte, on a parlé d’innovation. Il s’agit ici d’utiliser au mieux les ressources disponibles pour créer de nouveaux services et usages et impacter positivement le quotidien des citoyens.

Une innovation réussie se caractérise par sa simplicité

Tout au long du salon, nous avons évoqué des cas précis de territoires, collectivités et même pays (avec une scène dédiée au continent africain notamment) qui ont dû, ou vont devoir relever les grands défis de demain. Certains de ces territoires ne disposent pas de beaucoup de moyens, c’est notamment le cas des petites villes. C’est pourquoi les idées qui pourront être mises en place facilement seront les plus simples. Simples dans leur conception, mais aussi dans les usages qui en seront fait. Ainsi, nous avons besoin d’imaginer plus d’innovations d’usage que technologiques. Nous ne serons pas forcément en rupture, mais plutôt dans une posture d’adaptation, de mutualisation de moyens, de réutilisation et détournement des systèmes existants.

Finalement, la sophistication extrême d’une idée, c’est sa simplicité. Aujourd’hui, il est plus simple d’imaginer un système complexe, bardé de capteurs et de systèmes électroniques en tous genres que de concevoir une idée simple, sobre en ressources, utilisable simplement et intuitivement. C’est le cas dans tous les domaines de l’innovation, et cela se retrouve sur le sujet des territoires, pour faire face au manque de moyen mais aussi à l’augmentation du niveau de complexité de nos sociétés.

Les villes et territoires de demain doivent être pensés par la communauté pour la communauté

Bien entendu, la réussite d’une innovation se mesure également par son impact sur les populations concernées. Tout au long des conférences Innopolis, nous avons beaucoup parlé des acteurs des territoires, qui doivent être intégrés dans la conception des produits et services qui leur seront destinés. Ces acteurs peuvent être des collectivités, des associations, mais aussi les citoyens résidant sur les territoires. Remettre l’usager et l’Humain au centre de la conception de nos villes et territoires, c’est maximiser l’impact de nos actions. Nous nous assurons d’agir sur un besoin réel des populations et créons une expérience utilisateur fluide et simple. C’est aussi en comprenant les usagers réels et leurs besoins individuels que nous allons pouvoir concevoir des solutions équitables, et non pas égales.

L’impact des innovations territoriales sur les populations est important. C’est ce que nous explique notamment la représentante d’Engie Access sur le forum Afrique. La création de kits énergie autonomes pour fournir de l’énergie dans des territoires non reliés au réseau, a un impact direct sur les activités économiques locales, et permet donc de développer de nouvelles activités. Chaque nouveau service, dispositif, conception, influence la vie de nombreuses personnes. Il nous faut donc penser intelligemment.

Un dispositif adapté aux communautés, c’est aussi un dispositif qui vient soutenir les traditions et s’intègre parfaitement dans le tissu social préexistant. Par exemple, l’installation par une ONG de filets au Maroc qui captent l’eau des brouillards pour abreuver des villages. Le puit étant un lieu de sociabilisation fort, le dispositif a été pensé pour conserver cette tradition et l’eau est donc réinjectée dans les réseaux existants pour être ensuite puisée par les populations. On peut maintenir les rites existants ou en créer d’autres, comme suggéré dans un projet de data center intégré au centre des villes, comme une néo-église digitale, contenant localement les données des citoyens.

Chercher des solutions ailleurs que dans le digital

Les caractéristiques des enjeux et défis de la transition des villes et territoires sont clairs : nous devons optimiser les ressources à disposition et penser des solutions simples, sobres et durables pour faire face à la crise écologique. Et pourtant, les exemples concrets d’innovations que nous avons pu observer sur le salon sont quasi systématiquement technologiques et digitaux.

L’intelligence ne se réfère plus aux humains mais aux machines

La smart city que l’on nous dessine pour demain est truffée de capteurs, intelligences artificielles, drones et autres machines. Nous vivons dans un siècle ou le mot « intelligent » ne se rapporte plus qu’aux machines. Lors d’une conférence, on nous a affirmés que l’ « on ne pourra plus faire marche arrière sur le numérique » pour justifier le besoin grandissant d’infrastructures. Bien sûr, le numérique peut résoudre certains de nos problèmes, mais il est dommageable à mon sens que ce soit toujours la solution avancée avant même d’étudier le problème en profondeur. Notre civilisation se détache des autres par son usage de la technologie et du digital, nous avons façonné nos sociétés sur ce modèle. Cela créé un biais cognitif qui nous pousse immanquablement vers des solutions technologiques, que nous pensons plus efficaces, plus impactantes, plus intelligentes.

Et pourtant, les moyens dont disposent certains territoires ne permettent pas l’adoption de toujours plus de systèmes digitaux, coûteux et difficiles à mettre en place. Je plaiderai donc ici pour l’innovation sociale, l’innovation low tech, l’innovation créative. L’Homme est créatif par essence, et peut donc relever le défi intellectuel de trouver des idées simples pour résoudre des problèmes complexes, même si cela demande plus de réflexion. Nous pouvons nous réapproprier l’adjectif « intelligent », évoquer les humains plus que les machines.

Un problème environnemental posé par l’accumulation de nos données

Un rapide coup d’œil sur le site internet du salon Innopolis vous permettra de voir la liste des innovations qualifiées d’incontournables, présentées sur les stands lors de l’évènement. La grande majorité d’entre elles sont des services numériques qui s’appuient sur de la data, de l’intelligence artificielle, etc. Pour faire face aux enjeux environnementaux de notre siècle, nous nous équipons de capteurs et de systèmes complexes pour optimiser nos ressources. Il s’agirait de ne pas oublier le coup environnemental des services digitaux. Les data center à eux seuls consomment une quantité d’énergie démesurée. Et vous n’êtes pas sans savoir que l’intelligence artificielle s’appuie sur une très grande quantité de données qui sont collectées et analysées par des ordinateurs.

Il est parfaitement louable de trouver de nouvelles manières d’optimiser les ressources à disposition, mais il est nécessaire, pour effectuer une transition durable de nos villes et territoires, de calculer le coût réel de nos solutions. Des solutions technologiques sont possibles pour répondre à nos divers besoins, mais nous ne devons pas oublier d’être intelligents, au sens humain du terme, pour ne pas nous laisser aveugler par les sirènes des toutes nouvelles tendances. Soyons créatifs et pensons un large panel d’idées pour choisir la meilleure pour les citoyens d’aujourd’hui mais aussi pour ceux de demain.

Pauline Lansac

Cheffe de projet innovation et design fiction

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